PENSER A LA RECONCILIATION ET A LA CICATRISATION DES PLAIES PSYCHOSOCIALES AU BURUNDI

Le Burundi se prépare à la mise en place des mécanismes de la justice transitionnelle. Les enjeux de ce processus sont entre autres la redéfinition de l’histoire nationale et la découverte de la vérité sur les événements qui ont endeuillé le peuple burundais. Dans un pays où les plaies des conflits sociopolitiques ne sont pas encore cicatrisées et où les politiques s’empressent aux échéances électorales de 2015, il y a lieu de soulever certaines interrogations : comment intégrer le processus de justice transitionnelle dans le dynamisme du réalisme actuel pour une réconciliation nationale? Comment pourra-t-on gérer les traumatismes psychosociaux réveillés suite à la découverte de la vérité ? Pour mieux réfléchir à ces interrogations, le Centre Ubuntu a organisé du 22 au 23 Août 2013 (au Centre Suédois de Bujumbura) une « session de renforcement de capacités des membres du Réseau Ubuntu sur la Justice Transitionnelle et sur l’accompagnement des traumatismes individuels et collectifs consécutifs à la découverte de la vérité. » En plus des cadres du Centre Ubuntu, les délégués du Réseau Ubuntu venaient des groupes suivants :

 

1

 

Amis du Centre Ubuntu (ACU) de Ruyigi en Province Ruyigi

 

2

 

Amis du Centre Ubuntu (ACU) Ruhororo en Province Ngozi

 

3

 

Association Pour le Counselling (APC-HUMURA) de la Commune Itaba en Province Gitega

 

4

 

Association des Animateurs Psychosociaux (AAPS-UBUNTU) Bubanza

 

5

 

Association des Animateurs Psychosociaux (AAPS-UBUNTU) Mutimbuzi en Province Bujumbura

 

6

 

Centre Gender du Burundi (CEGEBU) Kayogoro en Province Makamba

 

7

 

Cellule Opérationnelle Chargée de l’Animation Psychosociale (COCAPS-ASUMA TUGORORANE) groupe de religieux et de religieuses catholiques

 

8

 

DUFASHANYE MU BUNTU formé d’ex-combattants et d’autres citoyens de la Province de Makamba

 

9

 

Initiative d’Assistance à l’Enfance en Difficulté (IAED) œuvrant en Province Karuzi

 

10

 

Leaders d’Ubuntu Kirundo (LUK) en Province Kirundo

 

11

 

TUGARUKIRE UBUNTU constitué d’animateurs, d’agents de la Police et d’administratifs des prisons

 

Des éléments constitutifs de la justice transitionnelle au réalisme national

Le frère Emmanuel Ntakarutimana qui a fait un riche exposé sur la justice transitionnelle a démontré qu’ici l’enjeu majeur consiste à pouvoir intégrer dans la situation actuelle du Burundi les éléments constitutifs de la justice transitionnelle tels qu’acceptés par les standards et principes internationaux. Avec les prochaines échéances électorales l’on se demande non seulement comment amorcer des initiatives en faveur de la recherche de vérité sur le passé sombre du pays sans porter préjudice au processus électoral, mais aussi comment on pourra arriver à la réconciliation et réhabiliter dans leurs droits les victimes des droits de l’homme sans réveiller les démons de la vengeance. La question aussi se pose au niveau de la réforme des institutions judiciaires et politiques afin de pouvoir poursuivre en justiceles auteurs des crimes. Comment serait-il possible de mettre en place des institutions crédibles et stables et réhabiliter juridiquement la confiance civique dans le contexte actuel. En tenant compte de l’évolution socio-politique du pays il est  important de redéfinir la mission des mécanismes de la justice transitionnelle. Il faut que ce processus donne des garanties de non répétition des crimes commis et qu’il soit le point d’appui pour la réconciliation nationale et pour la cicatrisation des plaies psychosociales des burundais.

La découverte de la vérité et la gestion des traumatismes psychosociaux

L’un des piliers de la justice transitionnelle c’est la découverte de la vérité. Or la vérité ne laisse personne indifférente. Les membres du Réseau Ubuntu ont peur qu’après avoir découvert la vérité les gens ne retombent dans des traumatismes psychosociaux. L’enjeu est de pouvoir gérer ces traumatismes et accompagner les éventuelles victimes pour la prévention et la thérapie des blessures psychosociales. Des méthodes d’accompagnement comme le counseling individuel et le théâtre narratif en communauté sont indispensables pour faire face à cette éventualité. Il est aussi recommandé de référer les victimes aux centres spécialisés de prise en charge des cas pareils (e.g. TPO, Centre Neuropsychiatrique) et encourager les gens à la résolution pacifique des conflits. Néanmoins, le défi reste de taille parce qu’on sera porté à gérer des phénomènes psychosociaux complexes qui peuvent non seulement être un obstacle à la découverte de la vérité et à la réconciliation nationale mais aussi qui peuvent déstabiliser psychologiquement l’accompagnateur.             

                                 

  Bigirimana Jean-Népo

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